Jeudi 23 juin, il est 19h . Je viens d’abandonner lâchement Julien qui charge le trafic, pour me rendre chez… mon coiffeur. Bah oui c’est important une belle coupe sous le casque. Surtout que ce weekend c’est la Vercingétorix qui est au programme : 700 bornes de pistes dans des paysages auvergnats de dingue. Sauf que je suis arrivé avec une heure de retard à mon rendez-vous et à partir de là, c’est l’effet papillon, une fois de plus, rien n’allait se passer comme prévu. Et c’est tout ce qu’on aime !
Après avoir passé environ quatre heures dans le fourgon, à rire, chanter, délirer, manger, se faire chier, prendre des photos, uriner dans… nous arrivons enfin à Lavoûte-Chilhac. Il est 2h du matin. Normal quoi. 5h de sommeil, on est large. Comme dit Ju : » Weekend qui pique, weekend épique ! »
Le soleil se lève sur le campement, laissant présager une belle journée. En sortant de la tente on découvre autour de nous une centaine de motos de toutes marques, de tous modèles et de toutes cylindrées. Ça allait de la WR 125 à la Triumph Bonneville en passant par la cargaison habituelle de GS et deux Ducati Scrambler (Lolo a dû faire des émules…). Chez Cocoricorando, pas de discrimination pourvu que tu ramènes ta fraise souriante et ta bonne humeur.
Thierry – Monsieur Tripy – nous confie ce qui sera notre bien le plus précieux pour ces trois journées : ce fameux GPS jaune poussin contetant les road-book. J’ai beaucoup discuté avec Thierry, un mec en or, vraiment passionné de chez passionné. C’est rigolo, je m’attendais à un look plus sexy et high-tech-bidule (comme les Garmin etc.) mais en fait c’est vraiment hyper sobre et intuitif comme outil : une boite rectangulaire, simple, étanche et bien robuste. Ça, ça me plaît.
De notre côté, en authentiques St-Bernard made in Savoie et en dignes représentants du pôle mécanique de Viedemotard, nous avions (presque) tout prévu pour porter assistance aux participants en détresse : on avait chacun un sac d’outils sanglés sur les motos et même un compresseur électrique pour éviter le supplice de la pompe à vélo aux malheureux tombés à plat. Mais c’était sans compter sur les copains de la Tafiole Team (rencontrés à l’automne sur la rando TT pirate) : Les parigots en DR, Eric, Rodolphe, et Charly étaient déchaînés. Ils auront réussi à mettre à mal nos compétences mécaniques dès la première journée. Il faut dire, que l’on avait pensé à beaucoup de choses mais pas à… une fourche de rechange.
Mais nous voilà sur les chemins, les pistes s’enchaînent avec fluidité. On remonte des groupes plus ou moins importants en se signalant et en les encourageant. Ce n’est pas une course, chacun son rythme. Tous se mélangent d’ailleurs : pros, confirmés, occasionnels et motards novices. Ceux qui passent avec aisance s’arrêtent aider ceux pour qui… ça passe moins.
C’est ainsi que l’on a pris sous notre aile, enfin sous nos poils de St-Bernard, Ben et Nico. Avec leurs Africatwin 1000 flambants neufs c’était le grand baptême du feu. Pour eux comme pour les machines ! Quand on est tombé sur eux, Ben, à bout de souffle, tentait de relever sa belle depuis 5 minutes après deux chutes d’affilées dans la même épingle. Lui qui voulait du dépassement de soi, il a eu sa dose ! Avec Julien, on se met de suite à leur service, car il n’y a pas que la mécanique qui peut lâcher dans ce genre de rando. Un peu de réconfort, deux ou trois conseils et les voila repartis comme en quarante! Ils vont nous suivre toute la première partie de la journée et d’autres se raccrocheront au fur et à mesure à notre petit « convoi pédagogique ».
Au détour d’un carrefour, je sens une odeur de brûlé émaner de mon fidèle tromblon. Mince, c’est ici que la grosse mémère va nous lâcher (même si nous savons qu’une Africa ne meurt jamais). Tu sens pas Ju ? C’est bizarre on dirait que quelque chose brûle ? Là il me crie : « Oh putain ! Tu fumes du cul ! » Une de mes sacoches latérales à sa sangle à moitié arrachée et elle vient du coup se plaquer contre mon silencieux. Elle était littéralement en train de fondre. Et les chambres à air de rechange dedans… aussi. Une sangle par ici, un sandow par là, et nous voila repartis.
C’est pendant la courte pause repas que nous rencontrons Seb, lui aussi en vieil Africa. Un bon candidat pour les Dirty Pirates le Seb : Bougnat, ex-crossman et complètement déjanté. Dès le premier chemin, nous savions que la journée allait prendre un autre rythme. Il glisse à gauche, il glisse à droite, un saut par-ci, un virage relevé par-là, un style au scalpel et une vitesse soutenue : nous avions affaire à un pilote. En fin d’après midi, Ju commence à tirer la langue et choisi de rentrer sagement. Il est 18h30, je serre les dents et mon guidon derrière Seb le fou furieux. Une chute dans un marécage et un orage plus tard, nous arrivons exténués au bivouac. Il est 20h, nous sommes les deux derniers à avoir bouclé le parcours extrême.
La seconde journée commence sur les chapeaux de roues : les chemins défilent, un passage à gué, une série de viaducs, des tunnels. On en prend plein les mirettes ! C’est juste incroyable et je note intérieurement de penser à narguer Cigalou qui rate ça. C’est que c’est comme si on roulait sur ses terres : ses parents habitant dans le coin, il a pour habitude d’écumer le secteur avec son père. Avec Ju, on s’arrête pour lui envoyer une petite photo d’enfoirés juste pour le faire baver. La réponse est immédiate : « Passez à la maison bande de connards j’y suis ! Le parcours passe juste à côté j’ai les bouuuuuuules ! «
On l’excusera pour son langage familier, mais c’était le cri du cœur et ce ne sera pas le dernier. Il était parti la veille pour déménager une partie de ses affaires suite à sa mutation en Ardèche. Justement, voilà la Tafiole Team qui nous rejoint devant chez ses parents. Ils ont eu la même idée que nous. Et voilà la bande de copains au complet : « T’as une moto qui fonctionne? », »T’as un casque ? », « T’as tes bottes? ». Presque ? Alors ce fut une évidence : « Et ben tu viens ! ». 5 secondes plus tard il était sur son XTZ que l’on venait de lui redémarrer en deux temps trois mouvements (mais qu’il est nul en mécanique ce mec). Et nous voila repartis accompagnés d’un clandestin à la barbe rousse. C’est un pur moment entre potes comme on aimerait pouvoir en vivre tous les weekends. Une vraie arsouille de barbus. Nous étions déjà heureux d’être là, heureux de le voir venir, et encore plus heureux de le savoir heureux! Je sais ça fait beaucoup de « heureux », mais quand on aime on ne compte pas. La team vie de motard ça ressemble un peu à une famille!
La trace qui nous mène aux gorges de l’Allier, était magnifique et Cigalou s’en donnait à cœur joie. L’après midi s’est enchaînée à toute vitesse : encore des forets, des passages à gué, des pistes, des départementales. C’est alors que nous croisons le 4×4 d’Antoine Deswarte. Fair Play, Cigalou le prévient sur le ton de la confidence : » Gaffe Antoine, sur le parcours il y a un clandestin. Mais, je ne t’ai rien dit hein. Chut. » Et on repart à fond. A non, pas à fond. Il y a un secteur de forêt limité à 30km/h et nous le respectons scrupuleusement. Pirates oui. Sauvages que nenni. Il faut savoir donner une belle image de notre passion aux randonneurs pédestres croisés. Et puis c’est aussi respecter le travail de titan du traceur Yann qui nous avait négocié avec les autorités le passage dans cet endroit sublime mais interdit à la moto en temps normal. Chapeau.
Cigalou s’éclipse une fois arrivé au lieu de bivouac. Il a des cartons à finir de déballer. De notre côté on est déjà occupé à réviser nos motos et à régler la fourche d’un aficionado de l’attachante Mash 400 adventure. Je crois que ça commençait à se savoir qu’il y avait deux St-Bernard aux mains pleines de cambouis dans le coin. Bien tiens, justement, nous voyons arriver les deux charmants jeunes hommes rencontrés dans un bar à midi avec une roue à la main : « Dites les artistes, vous n’auriez pas une chambre à air arrière de 18 ? » En plus d’avoir cette fameuse chambre, on leur a bien sûr donné un coup de main. Et quelques tuyaux de montage classés X. Une marque de fabrique Jacquie et Michel.
Le lendemain, on s’attaque au plateau du cantal. Face à nous, les grands espaces saupoudrés de blocs de granit. Certainement subjugué par un tel paysage ou alors trop concentré sur sa prochaine blague le pilote-clown de la T3, Nico Lantenois, a fait boire la tasse à sa 1200 dans le seul passage à gué du plateau (certes très profond). Malgré des efforts acharnés, impossible de la réanimer. Il faut dire que Béhème n’a pas l’air de juger nécessaire de fournir une clef à bougie dans sa trousse à outils d’origine. Et nous, ben… on roule pas encore en BMW. Donc on a pas pu faire.
L’après midi se passe bien et les pistes plus simples techniquement nous permettent de rentrer plus sereinement. Cela ne sera pas suffisant pour Julien qui rincé par ces trois jours intenses coupe par la route les trente dernières bornes. Ce sont pourtant essentiellement des grandes pistes rapides sous les éoliennes. Un peu avant l’arrivée l’on descend par une superbe forêt où je n’ai pas loupé l’occasion de me vautrer tout seul à 5 km du finish dans une flaque de boue.
Le soir, on a réalisé que l’on venait de faire notre première rando trail « officielle ». Pour nous, ça aura été avant tout un formidable regroupement d’êtres humains dont l’intérêt premier est de faire battre leur cœur au rythme de leur machine. Comme nous, ils ont voulu se sentir une âme d’aventurier tout en restant dans notre beau pays. Les paysages variés, les villages, les habitants chez qui l’on a cassé la croûte et souvent refait le monde le midi, tout cela nous aura fait autant vibrer je crois que si nous étions perdus dans une contrée exotique. Nous avons pu discuter au détour d’un chemin avec l’agriculteur du coin qui s’interrogeait de voir toutes ces motos et tous ces sourires. Il était heureux pour nous et il en aurait fallu de peu pour qu’il nous accompagne. Et ça c’est important. Merci aux organisateurs et aux participants de ce genre d’événement de contribuer à l’image positive de notre passion.
L’esprit trail a encore de beaux jours devant lui.
Salut Olive salut Julien
Encore un grand merci pour la chambre de 18 offerte et le montage également . A bientôt de vous recevoir dans le val de Marne !
Marc et Christian
Salut Michael!! Teneriste de Terre et Bitume? avec un accent du Vaucluse ou du gard? 😉
Salut Christian et en effet à bientôt dans le 94 ou sur les routes!!! Prenez soin de vous tous les deux!
Merci !!!!
J’y étais et en plus y’a ma brèle en photo.
Philippe
L’impression d’entendre le père Nico Lantenois raconter ses exploits !
Toujours agréable de lire ce genre de lignes, merci !
Caroline