Lorsque Syre s’est lancé dans le portrait de Shinya Kimura, il m’a demandé de vous écrire une petite présentation du personnage histoire de légender son travail. J’ai accepté sans savoir que la tâche serait quasi impossible. Alors que je m’attendais à trouver des quinzaines de sites retraçant la biographie de cet illustre préparateur, j’ai réalisé qu’à part une très succincte bio wikipedia (en angliche) et une encore plus minimaliste sur son propre site il n’y avait pas grand chose. L’homme est étrangement rare sur le net. Et pourtant, chacune de ses apparitions vidéo est une explosion visuelle parfaitement maîtrisée et codifiée. Est-ce un sensei de la com’ hipstero-vintage ou un authentique maître-forgeron « possédé » par son art ?  Impossible de trancher avec mon absence de connaissances. J’ai donc abandonné l’idée d’un bête et laconique topo biographique pour une « vie rêvée ».  

Shinya Kimura, je l’ai découvert il y a quelques années de ça dans une vidéo blitzérisante à souhait où il exposait sa conception de la moto. Et il m’avait foutu des frissons de partout le bougre.

Instantanément, il a incarné chez moi cette image – certainement aussi utopique que cliché – du Maître Japonais hors du temps ouvrageant lentement le métal de ses machines comme jadis d’autres forgeaient l’acier de ces sabres aussi tranchants que robustes. Vous connaissez tous ma dévotion pour les motos japonaises. Du coup imaginez comme un préparateur japonais ça ne peut que frôler la perfection du pléonasme dans mon imaginaire. Depuis, je guette chacune de ses rares apparitions sur internet. J’ai du mal à mettre des mots sur cette sensation de quintessence de la passion qui se dégage de ce type. Et comme je le disais au début, je ne sais toujours pas – et ne préfère pas savoir – si c’est juste un roi de la com’ ou un vrai « vieux fou de moto ».

Je n’ai ressenti une telle sensation qu’une autre fois dans ma vie : A un concert de musique classique. Ma musicienne de copine m’avait obligé à me compacter dans le poulailler du poulailler pour écouter Grigory Sokolov.

Apparemment, ce mec c’est un peu le fantasme du pianiste ultime : Un géant russe taiseux qui refuse les enregistrements studio et ne donne que quelques très rares concerts annuels avant de retourner à sa vie d’ermite. Il travaille pendant des mois et des mois les œuvres qu’il joue avec une virtuosité et surtout une musicalité absolument uniques. En bon gros balourd j’ai rétorqué à Madame – qui était toute émotionnée d’avoir eu des places – : « Mouais en gros c’est encore un pro de la com’ qui se la joue poète disparu ». Sauf que le concert a commencé. Et j’ai été subjugué. Je crois que je suis resté figé la bouche ouverte pendant les plusieurs heures qu’ont duré son récital. Ce n’était pas du marketingue, mais du génie. Aujourd’hui tout est tellement mis en scène et « story tellé » que l’on semble oublier que ça puisse exister pour de vrai, le génie. Shinya Kimura me donne cette même impression. Celle d’avoir affaire à un vrai et sincère artiste.

Ce portrait que Syre a réalisé lui a demandé 50 heures de travail minutieux, point par point. Je suis certain que Shinya Kimura adorerait ce genre d’œuvre toute en minutie et délicatesse. Dans ce tableau, je trouve qu’il se dégage une même intensité dépouillée que dans les machines du Maître. Nous n’avons aucun moyen de le contacter et quand bien même, nous parlons tous les deux affreusement mal anglais.

Concentré sur sa prochaine machine, certainement assis sur un tabouret dans son atelier de l’autre côté du monde, Shinya Kimura ne verra jamais ce dessin. Certains hommages se doivent d’être discrets.  

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Syre a commencé par faire des graffitis perché sur sa mob trafiquée. Aujourd'hui, à 31 ans, le rebelle du village chevauche désormais le 883r de ses rêves d'ado. Et s'il a abandonné le tag c'est pour mieux se consacrer au dot work et au lettering. C'est un sale gosse oui. Mais un sale gosse sacrément talentueux.
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5 Commentaires

  1. A la limite du sublime …
    Des hommes tels que ceux ci font la preuve de la grandeur dont nous pourrions êtres capables si nous nous en donnions la peine …
    Moi le vieux béotiens dur à cuire , devant tant de beauté , ils m’ont foutus la larme à l’oeil .
    Bravo cigalou

  2. Je connais ce bonhomme au travers de la meme video et je confirme sa fou des frisons (surtout quand la passion de la mecanique et du travail du metal t habite)

    Un vrais artisant comme ont en vois presque plus !
    Banzai

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