La semaine dernière, j’ai connu le Vietnam. Pas le pays hein, la guerre. Tel un GI’s dans la jungle, je suis prétentieusement allé défier les Cévennes un jour d’orage. Et comme les Ricains, ben j’ai lamentablement perdu. Pourtant, contrairement à eux, j’étais prévenu que ça allait mal se passer. A la météo, ils montraient de gros nuages tous noirs avec des éclairs. Sauf que je me suis dit « chuis un vrai Parigot maintenant, j’ai roulé tout l’hiver sous la pluie, c’est pas une rincée tiédasse qui va me faire reculer ».
Et puis j’étais même content, ça tombait bien, je n’avais toujours pas pu tester mes nouveaux équipements sous l’eau. Alors je suis parti la fleur au fusil pour une bataille que j’imaginais gagnée d’avance : la D 906 entre Alès et Pradelles, un chef-d’œuvre routier aux centaines de virages sur un bon bitume bien lisse. Une route que je connais par cœur. Ma spéciale. Une opération de routine quoi.
Il y a eu un premier signe quand en sortant de chez mes beaux-parents je me suis vautré – à pied – dans la pelouse détrempée entre la maison et le garage. Le cuir plein de terre, j’aurais dû me dire : tu partiras demain. Mais non, chuis un motard, un vrai. Orgueil, quand tu nous tiens… En sortant d’Alès, sous un léger crachin, j’ai subi l’attaque kamikaze d’un moineau suicidaire qui est venu s’écraser sur le phare gauche du V-Strom, laissant une trainée de sang derrière lui. Le baptême du feu, la première victime. Putain de Vietnam cévenol.
Dans un virage un peu avant Génolhac, c’est du plus gros calibre qui m’est arrivé dessus. Une vieille 406 « tunée » qui roulait à la gardoise glisse sur une plaque d’égout et fonce sur moi à toute vitesse, en travers de la route. Je sais pas pourquoi, mais ma première pensée fut « Top Gear France, c’est à chier ». Puis j’ai réalisé que j’allais me faire couper en deux. J’ai jeté ma roue avant dans le mini bas-côté, entre le bitume et le précipice, et j’ai réussi à m’y arrêter tant bien que mal. De son côté, mon « assaillant » est allé se crasher avec fracas un peu plus haut dans un muret. Au nom de la Convention de Genève, je me suis porté immédiatement au secours du conducteur qui s’en est finalement tiré avec plus de peur que de mal. Faut dire qu’il possédait un airbag naturel assez conséquent… En enfourchant ma machine, maintenant j’en étais sur, je le savais : les Cévennes voulaient ma peau.
Entre Génolhac et Villefort, c’est l’artillerie qui s’est déchaînée : un orage dantesque, un « épisode cévenol » comme ils disent au JT. Je suis traversé de part en part. Car, bien évidemment, j’avais poussé la prétention jusqu’à partir en équipement d’été sexy. Bouffon. Continuant d’avancer malgré tout, enchaînant les virages sans pencher d’un centimètre la moto à la folle vitesse de 60 km/h, je luttais bec et ongles. Rageuses, les Cévennes me lancèrent alors – en plus de la pluie – leur gaz moutarde : le brouillard. Une arme de destruction massive pourtant interdite depuis 1925. Aucune pitié. Nageant donc dans une épaisse purée de pois, je ralentis encore ma vitesse à 30km/h. Et pourtant, ce fut à peine assez lent pour éviter de justesse un camping-car sans feu arrière vers La Bastide. Le piège classique. En basculant sur Langogne, je me suis cru tiré d’affaire. La pluie avait cessé, la brume s’était dissipée. J’avais vaincu, j’avais traversé les Cévennes. Rincé dans tous les sens du terme, tremblotant, je bombais alors fièrement le torse. Grossière erreur. Une bourrasque de grêle s’abat aussitôt sur moi, comme si on me jetait des pierres sur le casque. La contre-attaque est trop violente. Je m’arrête sous un abribus, penaud. La montagne avait gagné.
A la nuit tombée, en arrivant à l’étable de mes parents complètement groggy, ayant mis le double du temps habituel pour le même trajet, je peux te dire que cette pluie m’avait lavé de toute forme de prétention ou d’excès de confiance. On a beau avoir le matos adéquat (ce qui n’était pas mon cas), une moto ultra-fiable (et quoi que j’en dise, le V-Strom l’est), on reste des fétus de paille face à la toute puissance de la nature. Et ça, ça fait du bien de se le rappeler de temps en temps…
Toi le (ou la) motard(e) – forcément gourmand(e) de routes virevoltantes – sache que le plus bel hommage que tu puisses rendre à la montagne, c’est de toujours l’aborder avec la plus grande humilité.
Sèche bien !
Je la connais bien ta virée cévennole, il ne te manquait que la neige,
Si j’aurais su j’aurais pas venu :’
Faut que tu viennes nous guider le weekend de l »ascension, on sera juste 80 🙂 papa tango charlie
Éventuellement il ne te manquait plus qu’une pluie de grenouille ou une brusque éclipse de soleil mais à part ça tu as eu ta part de bonnes surprises. C’est bizarre mais en te lisant j’avais aussi les images dans ma tête , pas toujours flatteuses (comme quand je t’imagines vautré dans la boue dans le jardin ) ou plus angoissantes (pour tes 2 presque rencontres avec des véhicules anormaux (plus que 2 roues ça frise la provocation)
Un Cigalou , je comprends que ça préfère le soleil
c’est trop ça ! ça me rappelle la fois ou c’et la neige qui m’a surpris ^^’
C’est incroyable et merveilleux, sacrées Cévennes, toujours aussi surprenantes, bon séchage près du feu de paille dans l’étable….
Comme ça j’ai fait le Cormet de Roselend le samedi, la Madeleine et le Glandon le dimanche, la Bonette et la Lombarde le lundi, mais il n’y avait pas de grêle ni de Gardois.
Ahahaha! j’ai pris la même bordée d’orages la semaine passée aussi… Du côté de St Martial…
Trempé des pieds à la tête…. Plus un poil de sec!
Ah les Cévennes, quand il pleut, ça mouille! LOL
Moïse sauvé des eaux !