The Doc

Tu t’en souviens plus mais je l’avais promis dans mon premier article : dès que j’en aurais l’occasion, je quitterais mon petit onanisme douillet pour parler d’autres types de ma génération qui « vivent » moto. J’ouvre donc ma galerie de portraits par mon pote Doc et sa Ninja.

Doc, tous les matins il va prendre son service à l’hosto à bécane peu importe la météo. Et le soir quand il rentre à point d’heure aussi claqué que Docteur Mamour après trois épisodes de Grey’s Anatomy (t’as vu un peu, comme je soigne mon public féminin), c’est aussi sur sa Kawa. Chez lui, c’est la bibliothèque du motard, tu cherches ce bouquin impossible à trouver, il l’a. Bon, si tu cherches des détails sur des maladies dégueu il a aussi mais moi c’est pas ma came. Il est tellement fou de moto qu’avec sa femme l’an passé ils sont partis en voyage de noce à bécane. Et dans une région au climat super propice à la balade moto en amoureux : l’Irlande. Je serais curieux de savoir comment il a réussi à embobiner sa dulcinée sur ce coup là : « Tu sais chérie, les Baléares, le sable fin, c’est surfait tout ça. On sera tellement mieux trempés jusqu’aux os tous les trois, toi, moi et la moto sous notre petite tente ». Il est très fort.

Bref, chez eux, le dimanche matin, c’est brunch devant le GP. Parce que je t’ai pas dit mais Doc son péché mignon c’est la piste. Dès qu’il peut il enfile sa combarde – et non, pas verte, bleue – et va user les flancs de ses pneus (et parfois un peu le carénage) de sa Ninja dans les virages de Carole. Il sait qu’il ne sera jamais champion, il s’en fout, il prend juste son pied à envoyer du très lourd sans risquer de se faire couper en deux à un croisement.

Et puis Doc c’est un peu Batman mais en mieux. Le jour il sauve des vies à l’hosto, la nuit il sauve des permis en peinturlurant les routes avec les motards en colère. Plus militant que Doc, ben t’es en taule. Il est de toutes les actions, de toutes les préventions. En guise de proue sur la bulle de sa Kawa cet espèce de flibustier a un autocollant de la FFMC. Quand t’es en rade sur une route, c’est le genre qui s’arrête au lieu de te laisser crever la bouche ouverte avec ta pauvre clef de 14 à la main. A croire qu’Hippocrate devait être motard lui aussi.

Mais j’y pense, je t’ai pas dit : Doc il en a une toute petite. Je parle de sa moto. Tordu. C’est un vrai motard qui roule en… 250. Ah ça t’en bouche un coin hein ? Va savoir pourquoi, on s’acharne à mesurer notre motarditude à la taille de nos cylindres. Freud aurait eu un sacré boulot sur le sujet… Mais c’est vrai bordel pourquoi une 250 ce serait moins une moto qu’une 600 ? Doc il l’a achetée parce qu’il voulait une sportive avec laquelle il puisse à la fois aller bosser et aller faire le con sur piste. En plus à l’époque c’était une bille en mécanique et il voulait partir sur une bécane neuve pour être tranquille. Mais avec un budget d’interne en médecine… Et quand tu mets tous ces critères dans la balance ben t’as plus beaucoup de choix. Et pourtant quand il te parle de sa moto, tu vois des petites flammes briller dans ses yeux. Sans oublier ces moments jouissifs où sur piste il fait l’inter à des moteurs XXL, ce qu’il est bien trop modeste pour te raconter lui-même. La passion moto ce n’est pas une histoire de pistons, c’est un état d’esprit.

Par contre il a un énorme défaut mon pote Doc. Il est infidèle. Il s’est embarqué dans une histoire pas possible avec une superbe italienne à fort tempérament. La bonne nouvelle, c’est que depuis qu’il a une vielle Ducat’ dans son garage, il a vachement progressé en mécanique. Et puis la Ninja n’est pas prête de prendre la poussière…